Critique de disque | Matthias Goerne, Chostakovitch : mélodies tardives

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Chostakovitch : Suite sur des vers de Michel-Ange, Octobre 

Matthias Goerne, baryton; Orchestre philharmonique de Radio France; Mikko Franck, chef

Alpha Classics, 2025

Ce nouvel enregistrement du baryton Matthias Goerne et de l’Orchestre philharmonique de Radio France dirigé par Mikko Franck contient deux œuvres tardives de Chostakovitch. La première et la plus importante est la Suite sur des vers de Michelangelo Buonarroti, op. 145a. Elle a été composée en 1974, peu avant la mort du compositeur, et présente onze textes de Michel-Ange traduits en russe. À l’origine, elle était écrite pour voix et piano, mais le compositeur a ensuite créé la version orchestrale que l’on entend ici.

Le tout est très Chostakovitch et un peu sombre. Le compositeur a donné des titres à tous les morceaux (qui, à l’origine, n’étaient désignés que par leur première ligne) : « Colère », « Aux exilés », « Mort » et « Éternité ». La plupart du temps, ce que nous entendons de l’orchestre est un Chostakovitch d’humeur sombre, voire colérique. Il y a beaucoup de cordes graves inquiétantes et de passages où les cuivres éclatants se mêlent aux timbales ou encore où les cordes aiguës se battent en duel avec les percussions accordées. L’utilisation de la voix va dans le même sens. La plupart du temps, elle est assez emphatique et se situe assez bas. Parfois, les voix ne sont pas accompagnées ou sont très peu marquées. Tout n’est pas ténébreux, cependant. Le deuxième poème, « Matin », reçoit un traitement plus rapide et plus léger, presque nostalgique, et dans « Nuit », il y a une belle écriture lyrique pour les cordes et la voix. Et puis, il y a une surprise à la fin. Le dernier poème, « Éternité », est tout à fait inattendu, avec un jeu très enjoué du piccolo, beaucoup de percussions lumineuses et joyeuses et une ligne vocale plus légère et plus rapide avant un fondu enchaîné silencieux.

La suite est très bien interprétée. Goerne est précis et adapte la couleur de sa voix à l’atmosphère du texte et de la musique de manière convaincante. Les tempos de Franck sont appropriés et l’orchestre produit le son que l’on attend de Chostakovitch. Les cordes sont capables d’un legato lugubre, mais s’élèvent également jusqu’aux effets presque percussifs requis à certains moments. Les bois sont excellents et l’explosion des cuivres répond aux attentes, même si ce n’est pas tout à fait avec l’agressivité des anciens enregistrements de la Philharmonie de Leningrad. Les percussions sont très sollicitées. Tout est parfaitement bien rendu. 

Le deuxième morceau est Octobre, op. 131, un poème symphonique beaucoup plus court. Il s’agit d’une commande de 1967 pour le 50e anniversaire de la révolution d’Octobre et probablement l’une des dernières œuvres « officielles » du compositeur. Honnêtement, elle ressemble beaucoup à d’autres de ces œuvres de Chostakovitch et on ne sait jamais trop s’il se parodie lui-même. L’œuvre commence de manière assez sombre, puis comporte une section de confrontation plus intense, suivie d’un lyrisme tendu, jusqu’à ce que la liesse prolétarienne éclate – d’abord sous la forme d’un petit air joyeux, puis avec un finale « triomphaliste » classique, avec beaucoup de cuivres et de percussions. La conclusion est à mi-chemin entre une marche et un galop. Tout à fait typique.

L’enregistrement est clair et évite tout débordement, même dans les passages les plus denses. Dans la suite Michelangelo, la voix est bien équilibrée vers l’avant, mais sans excès. L’enregistrement est disponible sous forme physique, MP3 et FLAC/WAV aux formats 44.1/16 et 48/24. J’ai écouté la résolution numérique standard. Le livret contient les textes complets et les traductions.

Dans l’ensemble, il s’agit de versions estimables de deux œuvres moins représentées de Chostakovitch.

Traduction : Andréanne Venne

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A propos de l'auteur

After a career that ranged from manufacturing flavours for potato chips to developing strategies to allow IT to support best practice in cancer care, John Gilks is spending his retirement writing about classical music, opera and theatre. Based in Toronto, he has a taste for the new, the unusual and the obscure whether that means opera drawn from 1950s horror films or mainly forgotten French masterpieces from the long 19th century. Once a rugby player and referee, he now expends his physical energy on playing with a cat appropriately named for Richard Strauss’ Elektra.

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